Chirac interpellé sur la question berbère

Chirac interpellé sur la question berbère

mars 26, 2016 7 Par
Une lettre ouverte a été adressée au président de la république française.

Article déjà publié le mercredi 10 septembre 2003 sur http://Tamazgha.fr
par Masin

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © William Doukhan pour https://les-francophones-d-israel.com/
Né à Biskra en 1942, ayant grandi à Constantine, William Doukhan fut forcé, à moins de 20 ans, à l’exode et quitte ainsi, malgré lui, son pays. Actuellement il fait partie de l’équipe de « Primo-Europe », un site internet qui œuvre pour la promotion de l’amitié entre les femmes et les hommes de tous horizons.

Comme tous les Juifs nés après la Shoah, William Doukhan dit ne pas pouvoir rester insensible aux tourments des peuples opprimés.

Scandalisé par la situation imposée aux Imazighen en Afrique du Nord ainsi que par la situation que près de deux millions de Berbères vivant en France, il adresse une lettre au président Chirac par laquelle il lui demande d’agir afin que cesse l’injustice que vit le peuple berbère.

Carte berbère documentation française

Carte berbère documentation française

Les Berbères

Les Berbères

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Nous publions ci-après la lettre adressée à Jacques Chirac.


Monsieur le Président de la république française,

J’ai longtemps hésité avant de vous écrire. On dit qu’il vaut mieux s’adresser au bon Dieu qu’à ses saints. Sauf votre respect, autant s’adresser à un mur. Vu l’état de délabrement du monde, Dieu n’a que faire d’un citoyen français de confession juive qui fait allégeance à une cause que personne ne veut entendre.

Alerter les médias français sur ce qui fait l’objet de mes préoccupations ? Le fait d’y songer sérieusement relèverait tout simplement de la carence mentale.

Un flagrant déni des droits de l’homme ne pèse pas lourd au regard de la polémique que les professionnels de l’information sont tenus d’alimenter dans un interminable conflit aux enjeux stratégiques et économiques considérables pour… leurs carrières. De toute façon, ils sont injoignables et pour la plupart, quasiment hermétiques à tout ce qui ne flatte pas leur béate unanimité.

J’ai bien pensé en référer à Monsieur… Raffarin. Il y va tout de même d’un peuple opprimé qui n’aspire qu’ à vivre sa spécificité en toute liberté.

Je me suis vite ravisé car, en matière de politique étrangère, qu’on le veuille ou non, il faut en convenir, vous êtes l’unique maître à bord. Vous seul, Monsieur le président, êtes donc à-même de répondre à mon attente.

C’est pourquoi j’ai décidé de mettre un terme à mes tergiversations : aussi je sollicite de votre haute bienveillance de bien vouloir user de votre influence pour amener vos alliés arabes à adopter un modèle politique plus compatible avec les valeurs qui sont les nôtres. Conscient de mettre le doigt sur un sujet on ne peut plus sensible, c’est au nom de la solidarité avec les peuples menacés dans leur identité que je m’adresse solennellement à vous.

Ardent défenseur de la paix à tout prix, n’hésitant pas, pour des considérations ’purement’ humanitaires à vous ingérer dans les affaires de pays souverains, vous symbolisez un ordre nouveau qui ne s’embarrasse plus des schémas traditionnels. Votre action vise à rétablir un juste milieu au niveau des doctrines politiques car, vous l’avez perçu, trop de démocratie tue la démocratie. Vous avez donc entrepris de rétablir l’équilibre mondial en vous focalisant sur les extrêmes.

Donner leurs chances aux pays totalitaires d’exprimer un totalitarisme à visage approximativement humain et appeler fermement les démocraties avant-gardistes à moins d’arrogance est un concept révolutionnaire qui peut notamment plaider en faveur du dossier qu’il me tient à cœur de vous soumettre ici :

Monsieur le Président,

Un grand peuple, valeureux et fier, vit actuellement sous le joug de nations qui tendent à se fédérer sous l’étendard unificateur de l’arabisme.

Ayant un nom bien à lui, sa propre langue, sa propre culture, une tradition différente, ce peuple, converti de gré ou de force à l’islam depuis de nombreuses générations, se retrouve sous la férule de gouvernements qui lui refusent toute légitimité en dehors du panarabisme.

Majoritaire au Maroc, regroupant les plus importantes minorités de Tunisie et d’Algérie, le peuple BERBÈRE souffre de ne pas pouvoir s’exprimer démocratiquement.

En butte à l’islamisme, deux millions de Français berbères se revendiquent de la laïcité qui fait la fierté de notre société pluraliste. Notre démocratie leur a ouvert la possibilité d’être en même temps, de bons musulmans et des citoyens français déterminés à régénérer nos principes de liberté, d’égalité et de fraternité.

Concernées au premier chef, les femmes berbères sont à l’avant garde de ce combat, hélas un peu craintif, pour une émancipation citoyenne dans la dignité et la tolérance religieuse.

Qu’attendent ces dizaines de millions de nos frères humains de nous, de vous, Monsieur le Président ?

Aide, compréhension et solidarité.

Pays hors de tout soupçon, la France peut intercéder salutairement en leur faveur. Il n’est pas irréaliste d’espérer que ses amis méditerranéens ne prennent pas trop ombrage d’une prudente et amicale ingérence de votre part. C’est ce que j’appelle de tous mes vœux.

Chef d’état le plus écouté dans cette région du monde, vous êtes, et de loin, le mieux placé sur l’échiquier pour donner sa chance à l’unique chance qui reste au peuple berbère de sortir indemne de l’ornière où il se morfond actuellement.

Assumeriez-vous cette responsabilité en vous impliquant au-delà de la platitude des mots ?

Dans l’affirmative, croyez bien que je serais le premier à m’en féliciter car, sans vouloir vous bousculer, je tiens déjà à votre disposition un autre dossier, tellement plus difficile qu’une fois délivrés de leurs chaînes, nos amis berbères ne seront pas de trop pour contribuer à libérer un autre peuple de la haine de ses voisins.

N’est-ce pas que j’aurais été mal inspiré de ne pas boucler la boucle ?

Veuillez agréer, Monsieur le président de la république, l’expression de mes respectueuses salutations.